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Les immigrés à Besançon
Tous les Algériens de Besançon étaient du même coin, du Constantinois, d’Aïn Beïda, d’Aïn Fakroun, de Khenchela…. Au début, ils ne savaient pas qu’il n’y avait pas de boulot, rien du tout, mais ils venaient quand même, pour voir, et puis, je crois que deux ou trois ans après, il y avait du travail pour tout le monde.
Les Algériens, les Africains, logeaient tous au « triage », derrière la rue Clemenceau, dans des wagons de marchandises. Il y en avait aussi à la Mouillère, à la Tour Carrée de Battant. Et dans des baraques en bois, des casemates. J’ai été plusieurs fois pour voir. Il faisait froid, il n’y avait pas de lumière, pas d’eau. Rien du tout. Des gens qui travaillaient et puis après le boulot qui rentraient avec des bottes, ils avaient de la boue jusqu’aux genoux. Personnellement, je n’ai pas connu beaucoup de misère par rapport à ceux qui étaient au triage ou dans les casemates.
Quand je suis arrivé ici, je suis moi aussi allé au « triage ». Je suis resté quelques jours là, puis je me suis mis à chercher du boulot. Il y avait de la misère. Heureusement, les Nord-Africains ont été beaucoup aidés par M. Jean Carbonare, l’abbé Chays et M. Pfister. J’ai été voir M. Carbonare. Il est venu avec moi aux Mines de Blanzy et le directeur m’a pris à l’essai.
Je ne savais ni parler, ni lire ni écrire le français. Je me rappelle, quand je suis arrivé en France, je ne savais pas comment vous appeliez le pain ; il fallait que j’aille voir quelqu’un qui parlait français, qui me disait comment on appelait le pain ! Après le travail, j’allais prendre des cours le soir dans la rue d’Arènes, avec Mlle Karrer, pendant trois ans et demi. Je crois qu’on était à peu près une vingtaine. L’arabe, on était quatre ou cinq qui savions le lire. Et puis les autres, ils ne savaient ni lire ni écrire, ni en arabe ni en français.